Abstract
Aujourd'hui, une grande partie de la population mondiale connaît les petites créatures bleues appelées les Schtroumpfs. Ce que la plupart ne sait probablement pas encore, c'est que les créatures d’un petit village fictif n'ont joué qu'un petit rôle de soutien au début dans une bande dessinée de l'artiste Pierre Culliford, alias Peyo. Au cours des dernières décennies, les créatures fantastiques du dessinateur belge ont subi de nombreux changements et transformations. Le texte qui suit explique plus en détail ces évolutions, avec un focus particulier sur le médium concerné.
Table des matières
- Les Schtroumpfs en BD (à partir de 1954)
- Les Schtroumpfs en animation (à partir de 1976)
- Conclusion
- Notes
- Bibliographie
Les Schtroumpfs en BD (à partir de 1954)
Le premier médium, qui sera analysé plus en détail, est aussi le médium original que Pierre Culliford a utilisé pour réaliser ses idées et ses histoires – la bande dessinée. La première scène dans laquelle les Schtroumpfs apparaissent se trouve dans La Flûte à Six Schtroumpfs, de la série de BD Johan et Pirlouit. Un Schtroumpf montre aux aventuriers Johan et Pirlouit le chemin de son village secret. L'illustration[1] montre quatre vignettes tirées de l'histoire, qui ont tous la même taille, à l'exception du panneau en bas. En général, la scène met en scène les deux protagonistes, un Schtroumpf qui les guide à travers une forêt rocheuse, et beaucoup de Schtroumpfs différents dans le village des Schtroumpfs dans la dernière vignette. En ce qui concerne le style artistique de Peyo, on peut noter que le dessinateur a une ligne très claire et nette, connue sous le nom de la « ligne claire », créée par l'artiste belge Hergé.[2] De plus, Peyo ajoute aux lignes des poids et traits de tailles différentes, de sorte qu'il y a des traits / signes plus épais et d'autres qui, parce qu'ils ont été appliqués plus fins, n'attirent pas autant l'attention du lecteur et ne sont remarqués directement. De cette façon, il est possible pour l'artiste de diriger l'attention sur des détails individuels et ainsi de contrôler le flux de lecture. Ceci est notamment utilisé par Pierre Culliford pour créer une certaine distinction entre le premier plan et l'arrière-plan. Concernant la couleur, on voit qu’il y a des contrastes utilisés pour mettre certains éléments de l'image en relief. Dans la section donnée, on peut le voir dans le contraste entre les vêtements des aventuriers et l'arrière-plan qui montre les environs du village. Ce sont des contrastes de saturation, comme les vêtements de Johan et Pirlouit et les maisons des Schtroumpfs contiennent des couleurs plus vives (jaune, vert et rouge), tandis que l'arrière-plan est désignée en couleurs plus insaturées (bleu, gris et marron). Pour soutenir le flux narratif et créer une sorte de dynamique, Peyo a utilisé des lignes de substitution qui représentent des mouvements et des émotions.[3] On les retrouve p.ex. dans la première vignette derrière le Schtroumpf où plusieurs petits traits émanent vers un point de fuite horizontal ; ou, dans la vignette en bas, autour des têtes des deux protagonistes où rayonnent des points solaires qui montrent un certain sentiment d'émerveillement et du choque au lecteur. Les bulles sont un autre dispositif narratif important dans les bandes dessinées. Ils soutiennent le contenu narratif de l'histoire et complètent les actions, les pensées et les émotions que les différents personnages ressentent ou exécutent.[4] Une chose étonnante à propos du médium de BD est que même sans actions intermédiaires, les vignettes créent une histoire cohérente et complète dans la tête du lecteur et, de plus, le lecteur a également la possibilité de lire l'histoire à son propre rythme comme il le souhaite.[5]
Pour conclure, cette scène de la bande dessinée semble un peu sombre et effrayante, particulièrement par sa coloration, ce qui donne à la scène une atmosphère mystérieuse, mais aussi excitante. De plus, le lecteur a la possibilité d'interpréter si le Schtroumpf ne conduit que les deux protagonistes sur deux rochers ou s'il s'agit en fait d'un voyage plus long à travers une forêt rocheuse.
Les Schtroumpfs en animation (à partir de 1976)
Avec la première apparition des Schtroumpfs dans la bande dessinée et son succès associé, ainsi que la forte demande pour plus d'histoires sur les Schtroumpfs, Peyo a décidé de donner aux Schtroumpfs plus d'espace à l'écran, ce qui a ensuite conduit à plusieurs adaptations de dessins animés. L'une des plus connues est l'adaptation cinématographique de la même BD montré précédemment, qui est comparé ci-dessous.[6] La même scène est utilisée pour la comparaison, dans laquelle un Schtroumpf conduit Johan et Pirlouit au village des Schtroumpfs. Ce clip commence après une bonne demi-heure du film. La plus grande différence ici se trouve dans le choix du médium. Alors que la bande dessinée stimule surtout le sens visuel et, dans une certaine mesure, le sens tactile en touchant les pages, le film offre la possibilité d'intégrer le sens de l'ouïe, ce qui signifie qu'il n'y a plus besoin de bulles au d’autres moyens similaires. Au tour des voix parlées, la scène est accompagnée d'une musique de fond qui donne à la scène une ambiance plutôt légère et joyeuse. Contrairement à la bande dessinée, aucune ligne de substitutionest nécessaire, car les informations manquantes dans la bande dessinée sont remplies par la séquence d'images dans le film et ainsi les mouvements et les émotions (également donnés par les effets sonores et la parole) peuvent être reconnus plus clairement. Contrairement à l'original, la forêt dans laquelle les personnages se trouvent est représentée différemment. Au lieu d'une forêt froide et rocheuse, la scène du film semble plus magique et fantastique car elle présente des rivières, des arbres et d'autres plantes colorées.
De plus, le niveau de détail en arrière-plan est plus élevé dans le film. Cela aide également à créer une forme de contraste entre les personnes qui agissent au premier plan et l'arrière-plan restant immobile, car, comme dans la bande dessinée, les personnages ne sont pas très détaillées et ont été dessinées avec aucun type d'ombrage et de dégradés, tandis que l'arrière-plan est très artistique et détaillé, jouant avec de nombreuses nuances et reflets de lumière. Les personnages restent fidèles au style de dessin original de Peyo et ont une valeur de reconnaissance directe. De plus, le film expire après une durée spécifique, il est donc déterminé à quelle vitesse la scène progresse. Contrairement à la bande dessinée, le clip semble ici plus longs, ce qui donne le sentiment que les protagonistes marchent une distance plus longue que dans l'histoire originale. En outre, il y a plusieurs dialogues et interactions entre les personnages, qui ne sont pas présents dans la bande dessinée. De plus, cette scène de chemin vers le village dans le film contient plusieurs petits extraits dans lesquels la perspective de la caméra change souvent. Il y a principalement plusieurs changements entre la caméra plongée, la caméra subjective et la caméra contre-plongée. Les deux premières perspectives de caméra aident le spectateur à comprendre les tailles des différentes personnages, la caméra plongé représentant les Schtroumpfs et la caméra subjective représentant les deux protagonistes. La caméra contre-plongée permet d'avoir une vue d'ensemble de la situation et de l'environnement, ce qui implique au spectateur ce qui se passe. De plus, il y a aussi de nombreux gros plans et plans rapproches qui soulignent le même principe de changement de rôles et de perspectives.[7]
Dans l'ensemble, la même scène est différente dans le film que dans la bande dessinée. Dans la bande dessinée, le déroulement de l'extrait de l'histoire est simplifié à l'aide de quatre vignettes, pendant que la scène du film dure environ trois minutes. De plus, une atmosphère complètement différente de l'environnement est créée, qui semble beaucoup plus vivante et plus joyeuse dans le film, mais comme dans la bande dessinée, l'aspect de suspense est toujours présent pendant la voyage vers le village des Schtroumpfs.
Conclusion
En résumé, les deux médias représentent en comparaison la même scène, le même contenu, mais les médias utilisés influencent l’estéthique et le choix du contenu et affectent la perception du spectateur ou du lecteur. En plus, ils jouent un rôle important dans la manière dont le contenu est présenté. De plus, malgré des différences majeures, il existe aussi des similitudes qui soutiennent la valeur de reconnaissance artistique de Pierre Culliford. Ainsi, dans les deux adaptations, il est toujours visible qu'il s'agit de l'œuvre du même artiste.
Cet aspect est en partie perdu dans les adaptations plus récentes dans le domaine du film 3D et des séries 3D, puisque les Schtroumpfs n'y sont reconnaissables qu'à leurs caractéristiques particulières, telles que la couleur de leur peau, leur habillement et leur taille jusqu’au point où les traces de leur origine sont ignorées.
- Hadi Ali Ghazi -
Ce texte d'étudiant a été réalisé dans le cadre du séminaire "Das BelgienNet III - das Filmland Belgien" (hiver 2022). Vous pouvez lire la version allemande de cet article ici.
Notes :
[1] Cf. CHABERT, Chrystel, « Redécouvrez Johan et Pirlouit, les premiers héros de Peyo qui ont vu naître les Schtroumpfs », in : Francecinfo : Culture, 29.05.2019, URL : https://www.francetvinfo.fr/culture/bd/redecouvrez-johan-et-pirlouit-les-premiers-heros-de-peyo-qui-ont-vu-naitre-les-schtroumpfs_3465977.html (26.02.2023). L'illustration dont il est question peut également être consultée sur cette page.
[2] Cf. BUTH, Christine, « Brüssel – Hauptstadt der Comics », in : Planet Wissen (2009), URL : https://www.planet-wissen.de/kultur/metropolen/bruessel_das_herz_europas/pwiebruesselhauptstadtdercomics100.html (26.02.2023).
[3] Cf. CAPART, Phillipe, Morris, Franquin, Peyo et le dessin animé, Angoulème, 2005, p.71-75.
[4] Cf. ibid.
[5] Cf. ibid., p. 68–69.
[6] Cf. Les Schtroumps en allemand (chaîne officielle de YouTube), « Die Schlümpfe und die Zauberflöte – Film – Die Schlümpfe HD », in: YouTube (03.08.2019), URL: https://www.youtube.com/watch?v=wJbLsxxukP4 (Time Code: 00:34:00-00:37:00) (26.02.2023).
[7] Cf. s.a., « angle de prise de vue », in: Kinema, URL: http://www.kinema.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=46&Itemid=73&lang=fr (26.02.2023).
Bibliographie
BUTH, Christine, « Brüssel – Hauptstadt der Comics », in : Planet Wissen (2009), URL : https://www.planet-wissen.de/kultur/metropolen/bruessel_das_herz_europas/pwiebruesselhauptstadtdercomics100.html (26.02.2023).
CAPART, Phillipe, Morris, Franquin, Peyo et le dessin animé, Angoulème, 2005, p. 68-75.
CHABERT, Chrystel, « Redécouvrez Johan et Pirlouit, les premiers héros de Peyo qui ont vu naître les Schtroumpfs », in : Francecinfo : Culture, 29.05.2019, URL : https://www.francetvinfo.fr/culture/bd/redecouvrez-johan-et-pirlouit-les-premiers-heros-de-peyo-qui-ont-vu-naitre-les-schtroumpfs_3465977.html (26.02.2023).
Les Schtroumps en allemand (chaîne officielle de YouTube), « Die Schlümpfe und die Zauberflöte – Film – Die Schlümpfe HD », in: YouTube (03.08.2019), URL: https://www.youtube.com/watch?v=wJbLsxxukP4 (Time Code: 00:34:00-00:37:00) (26.02.2023).
s.a., « angle de prise de vue », in: Kinema, URL: http://www.kinema.fr/index.php?option=com_content&view=article&id=46&Itemid=73&lang=fr (26.02.2023).